Sarkotélé : le retour des bouc-émissaires
Sarkotélé : le retour des bouc-émissaires
© Véronique Bury
La grande distribution stigmatisée… et cajolée
C'était le fonds de commerce du candidat Sarkozy. Le Président a beau
faire, il ne sait pas inventer autre chose. Premier dossier, première
cause repérable de la déception post-présidentielle, le pouvoir
d'achat. Nicolas Sarkozy a potassé les chiffres et ils sont, selon lui,
indiscutables : reprenant l'exemple du porc, qu'il avait déjà mentionné le 26 février 2008
lorsqu'il avait stigmatisé les supermarchés, accusés de vendre de plus
en plus cher les tranches de jambon au moment où les producteurs
voyaient leurs prix de s'effondrer, il montre à nouveau du doigt les
enseignes de la grande distribution. La conclusion est plus surprenante
: le Président propose d'abolir les lois Galland et Raffarin. Problème
: les géants de la grande distribution exigent justement la même chose
afin de pouvoir implanter encore plus de magasins sur tout le
territoire…
Les patrons à la fête
Deuxième bouc-émissaire, les entreprises qui refusent d'augmenter les salaires de leurs employés – même quand elles font «des milliards de profits»
- et de garder leurs seniors. Cette fois-ci, Sarkozy menace de
sanctionner : les branches qui refusent de négocier sur les salaires
verront leurs allègements de charges supprimés. Drôle d'idée : si, par
exemple, le textile ne parvient pas à un accord salarial, toutes les
entreprises du secteur seront sanctionnées, même celles qui,
individuellement, se montrent plutôt généreuses d'un point de vue
social. Le projet est soit impraticable, soit injuste. Il y a mieux :
le Président considère qu'un tiers des profits doit aller aux
actionnaires, un tiers aux salariés et un tiers aux investissements.
Formidable ! Mais que propose-t-il pour y parvenir ?
Les chômeurs fainéants
Le Président est revenu sur le projet du gouvernement de sanctionner –
par la suspension de leurs indemnités – les chômeurs qui refusent deux
postes, même un peu moins bien payés ou situés à moins d'une heure de
leur lieu d'habitation. Cette mesure facilitera-t-elle le retour à
l'équilibre des comptes sociaux ? Ce n'est pas la question puisque
Nicolas sarkozy reconnaît que les chômeurs «tricheurs» ou «fainéants»
sont «une minorité». Mais c'est une mesure «symbolique». Car comme pour
la spéculation, il s'agit d'introduire de la morale dans l'économie.
Bon courage….
Haro sur les spéculateurs
Le Président a renoué avec la tonalité guainoïenne de son discours, évoquant un «capitalisme qui marche sur la tête, qui a besoin d'être moralisé» et critiquant implicitement le montant de la rémunération de certains dirigeants : «Quand on a des salaires de ce niveau, il faut en tirer les conclusions.»
Et (re)pan sur la tête de Daniel Bouton, le Président de la Générale.
Il s'en est pris tout particulièrement aux Agences de notation qui «n'ont pas fait leur travail» et «doivent être sanctionnées».
A entendre le président, on a du mal à croire qu'il est vraiment passé
dans sa tête du statut de candidat à celui de Président : si la
rhétorique est restée intacte, si le discours paraît toujours efficace,
les solutions qu'il préconise restent floues. Vivement 2012. Pour nous,
mais aussi pour lui !
Jeudi 24 Avril 2008 - 21:45
Philippe Cohen
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