Jérôme Kerviel sera fixé sur son sort mardi à 9h00
SOCIETE GENERALE
NOUVELOBS.COM | 14.03.2008 | 16:09
Les débats sur la demande de remise en liberté du trader de la Société générale ont eu lieu à huis clos. Le parquet général avait annoncé jeudi qu'il demanderait le maintien en détention.
Jérôme Kerviel (c) Sipa
La chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris a mis vendredi 14 mars en délibéré jusqu'à mardi 9H00 sa décision concernant la demande de remise en liberté de Jérôme Kerviel, trader de la Société Générale soupçonné de falsifications à l'origine de la plus grande perte de l'histoire de la finance, a-t-on appris de source judiciaire.
Le parquet général avait annoncé jeudi qu'il demanderait le
maintien en détention provisoire de Jérôme Kerviel, incarcéré depuis le
8 février, arguant notamment des "nécessités de l'instruction puisque
les actes d'investigation se poursuivent".
"Il faut veiller à préserver toutes les preuves utiles à la
manifestation de la vérité et empêcher toute concertation frauduleuse",
avait expliqué sa porte-parole, Ulrika Weiss.
La défense de Jérôme Kerviel a pour sa part indiqué qu'elle évoquerait
à l'audience les éléments nouveaux contenus dans le rapport de la
mission "Green" de l'inspection de la Société Générale du 20 février,
qui, selon elle, seraient favorables au trader.
"Le rapport Green montre quatre choses importantes", a expliqué
Christophe Reille, conseiller du trader, avant le début de l'audience.
74 contrôles
"Il y a eu 74 contrôles (des activités du trader par la Société
Générale, ndlr) qui ont bien fonctionné sans que Jérôme Kerviel
n'intervienne dans la décision de la banque de ne pas y donner suite",
a détaillé Christophe Reille.
"Le rapport explique qu'il n'y a pas eu de détournement de fonds, que
Kerviel n'avait pas de complice et qu'il n'y a pas eu d'intrusion de sa
part dans le système informatique", a-t-il ajouté, en réfutant les
arguments du parquet général pour maintenir le trader en prison.
"Les risques de récidive, de destruction de preuves, de concertation
avec des complices ou de fuite sont nuls", a-t-il estimé, en rappelant
que la cour d'appel devait se prononcer "sur sa détention provisoire et
pas sur le fond du dossier, sur son importance". "Ce n'est pas un
préjugement", a-t-il insisté.
"L'enquête n'est pas finie. Il faut donner de la sérénité à la
justice", a pour sa part expliqué Me Jean Reihnart, l'un des avocats de
la Société Générale, en indiquant que la banque allait soutenir le
maintien en détention du trader.
Emprisonné à la Santé
Jérôme Kerviel a été mis en examen
le 28 janvier pour "abus de confiance, faux et usage de faux et
introduction dans un système de traitement automatisé de données".
Les juges d'instruction Renaud Van Ruymbeke et Françoise Desset
l'avaient initialement laissé en liberté mais sur la demande du parquet
général, la chambre de l'instruction l'a envoyé le 8 février à la
maison d'arrêt parisienne de la Santé.
A ce moment, la garde à vue d'un courtier d'une filiale de la banque,
Moussa Bakir, laissait penser à un nouveau développement de l'affaire
mais cet homme a finalement bénéficié du statut de témoin assisté, ce
qui a amené la défense de Jérôme Kerviel à dénoncer une manipulation.
Un épisode similaire semblait s'être amorcé mercredi, avec
l'arrestation et le placement en garde à vue d'un autre ami proche du
jeune homme, courtier dans la filiale de la banque SG Securities.
Il a cependant été remis en liberté vendredi matin sans être présenté
aux juges et sans qu'aucune charge ne soit retenue contre lui, a-t-on
appris de source judiciaire.
Seul accusé
Jérôme Kerviel reste donc seul dans l'affaire. Il reconnait les faits
depuis le début de la procédure, tout en expliquant que la banque avait
"fermé les yeux".
On lui reproche des prises de position à risque à hauteur de 50
milliards d'euros sur des "futures", des contrats à terme sur des
indices boursiers. Leur liquidation par la banque entre le 21 et le 23
janvier a généré une perte historique pour la finance de 6,3 milliards
d'euros.
La "facture" finale est de 4,9 milliards d'euros pour la Société
générale, car au 31 décembre 2007, de précédentes positions risquées
avaient déjà été liquidées par le jeune homme, mais cette fois au
profit de la banque pour 1,4 milliards d'euros, a révélé l'enquête
judiciaire.
Les manoeuvres de Jérôme Kerviel, dissimulées par des faux grossiers,
duraient depuis plusieurs années, ce qui amène les juges à s'interroger
sur l'éventuelle passivité de la hiérarchie du jeune homme, alertée
notamment en novembre 2007 par la société Eurex, partenaire de la
SocGen.