Prix du carburant : Ségolène Royal dans le gaz
Contre-expertise au quotidien des déclarations et des chiffres du débat public..
CEDRIC MATHIOT
Ségolène Royal (REUTERS)
«Ce qui est insupportable aujourd'hui par exemple, c'est le fait que le prix de l'essence ne baisse pas. Moi, j'entends de la révolte par rapport à ce problème de la vie chère. Le prix du brut vient d'être divisé par deux, et ça ne suit pas à la pompe. Le gazole était à 1,5 euro, il est à 1,2 euro. Il devrait être à 0,75 euro. Je peux vous dire que les gens sont révoltés par cette inertie gouvernementale».
SEGOLENE ROYAL CARBURANT
envoyé par liberation
Interrogée hier sur Canal Plus lors de Dimanche+, Ségolène Royal dénonce le fait que le prix du carburant ne soit pas strictement indexé sur celui du brut. Ce faisant, elle surfe sur un débat porteur, mais le simplifie à outrance.
Ségolène Royal souhaiterait que la baisse du prix du brut (à peu près divisé par deux entre juillet dernier et aujourd'hui) entraîne une baisse semblable du prix du gasoil. Cela n'a pas été le cas, et cela ne sera jamais le cas. L '«inertie gouvernementale» dénoncée par l'ex-candidate à la présidentielle n'y est pour rien. Car Ségolène Royal néglige plusieurs faits :
1) Depuis plusieurs mois, l'Euro perd du terrain face au dollar. Le pétrole étant acheté en dollar, la répercussion de la baisse du prix du brut dans les pompes européennes a donc été (partiellement) limitée.
2) Mais surtout, le prix du carburant à la pompe ne dépend pas seulement du prix du brut. Il correspond à plusieurs autres postes : la marge de raffinage (prix de la transformation du brut en carburant), la marge de distribution (celle des stations essence) et les taxes (TIPP et TVA).
Exemple : le vendredi 10 octobre, le gasoil affichait 1,25 euro à la pompe. Il se décomposait ainsi, selon l'UFC que choisir:
- 64 centimes d'euro de taxes (43 centimes de TIPP et le reste de TVA)
- 61 centimes de prix hors taxe (39 centimes de brut, 13 centimes de marge de raffinage, et 9 centimes de marges de distribution)
Comme l'explique François Carlier, économiste à l'UFC que choisir, «les marges de raffinage, les marges de distribution et la TIPP (43 centimes par litre, prix figé) sont totalement déconnectées du prix du brut». Seule la TVA varie en fonction du prix du pétrole, mais elle baisse (et augmente) en plus faible proportion que ce dernier, puisqu'elle est fonction du prix global du carburant.
Voilà pourquoi Ségolène Royal a évidemment tort de faire croire que le prix du gasoil devrait être divisé par deux parce que le prix du brut l'a été.
En fait, si scandale il y a concernant le prix du carburant en France (spécifiquement le gasoil), il ne tient pas à la reprercussion de la baisse du brut sur le prix à la pompe mais, selon l'UFC que choisir, aux marges de raffinage, qui ont pour ce gasoil explosé en six ans, passant de 2 centimes (en 2002) à 17 centimes (en mai dernier). Explication : un sous-dimensionnement des capacités de raffinage qui explique cette flambée des prix. L'UFC que choisir a dénoncé la semaine dernière cette stagnation des capacité de raffinage en Europe depuis 30 ans (communiqué et étude).
Selon l'association de protection des consommateurs, le prix du gasoil est aujourd'hui trop elévé en France à cause de ces marges de raffinage, environ d'une «dizaine de centimes d'euro». On est loin du litre de gasoil à 75 centimes d'euro...
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