Quatre croyances ébranlées par la crise
LE MONDE | 12.10.08 | 19h12
La fin de la présidence de George Bush coïncide avec la fin d'un cycle économique : celui ouvert en 1981 par Ronald Reagan, selon lequel "l'Etat n'est pas la solution. Il est le problème".
1) Le risque n'existe plus
Depuis
l'éclatement de la bulle Internet en 2000-2001, la Réserve fédérale
américaine (Fed) baisse régulièrement ses taux pour soutenir l'activité
économique. Logique : contrairement à la Banque centrale européenne
(BCE), fille spirituelle de la Bundesbank, qui reste marquée par
l'inflation allemande des années 1930, la Fed est traumatisée par la
dépression post-1929. D'où son laxisme et la ruée des ménages sur les
crédits immobiliers accordés par les banques, pour qui l'affaire est
très rentable.
Comme le reconnaît le patron de la banque JP Morgan Chase, James Dimon : "Dans la finance actuelle, il faut être très courageux pour ne pas prendre un risque qui peut vous rapporter de l'argent." Surtout, les banques sont peu à peu convaincues qu'elles ne courent aucun risque. Les crédits qu'elles consentent sont en effet "titrisés", transformés en produits financiers, cédés à d'autres. Puisque le risque est dilué un peu partout, il n'est plus nulle part. Erreur : quand la conjoncture se retourne, ces produits financiers se transforment en "boîtes noires" dont tout le monde se méfie. Résultat : le risque est au contraire décuplé.
2) Les marchés s'autorégulent
A la différence des autres banques, qui financent l'essentiel de leurs
prêts avec les dépôts de leurs clients épargnants, la Northern Rock,
spécialisée dans le crédit immobilier, obtenait ses fonds sur le marché
interbancaire en revendant les dettes de ses clients emprunteurs. Quand
ses concurrents ont commencé à se méfier, ils ne lui ont plus prêté
d'argent. D'où la crise de liquidités. Un scénario qui, depuis, se
répète des deux côtés de l'Atlantique. Pour rassurer les marchés, les
Etats, même les plus libéraux, sont contraints de nationaliser, au
moins partiellement, les banques en difficulté. Seule exception majeure
: la banque d'affaires américaine Lehman Brothers, acculée à la
faillite. Exemple nécessaire pour faire peur aux banquiers ou erreur
historique qui a incité les banques à ne plus prendre le moindre risque
? Le débat est ouvert. Une chose est sûre : le mythe de
l'autorégulation des marchés a vécu.
3) La finance n'est que virtuelle
Le volume des transactions consacrées à l'économie réelle ne représente
environ que 2 % de la totalité des échanges monétaires. Comme l'a
montré l'attitude de Jérôme Kerviel, le trader qui a fait perdre 4,9
milliards d'euros à la Société générale, les professionnels de la
finance ont oublié que celle-ci n'était qu'un outil au service du
financement de l'économie. D'où, notamment, les rémunérations folles
liées aux performances à court terme des transactions.
Aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne ou en France, bâtir une "nation de propriétaires" est un objectif politique majeur. Mais quand le marché immobilier se retourne, le rêve peut virer au cauchemar. Aux Etats-Unis, près d'un propriétaire sur six a des dettes supérieures à la valeur de sa maison et 700 000 ménages, incapables de faire face à leurs traites, sont aujourd'hui à la rue. En cause : les politiques commerciales des banques, qui cherchaient à "vendre du crédit" à tout prix. En 2005, dans 25 % des cas, les banques ne demandaient pas à une personne accédant à la propriété de justifier ses revenus.
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