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Mon Mulhouse3
31 juillet 2008

Rachida Dati, ministre à com' et à travers

Rachida Dati, ministre à com' et à travers

   

   

Avec près de trente communicants autour d’elle, la garde des Sceaux détonne par rapport à ses prédécesseurs. Enquête.

Rachida Dati en février dans la rédaction de Rue89 (Audrey Cerdan/Rue89).

Elle est unique et entend le rester. Rachida Dati a lancé la semaine dernière son blog, espace 100% autopromotionnel. « Ce n’est rien d’autre qu’un habillage marketing », explique sans fard sa conseillère en communication, Laurence Lasserre. Difficile d’affirmer le contraire. Un marketing entièrement financé par la Chancellerie, y compris la campagne de référencement payée à Google.

Son porte-parole Guillaume Didier justifie lui la démarche: « Ça correspond à une demande. » Du Dati en veux-tu en voilà, mais en vidéo uniquement. Vous n’y trouverez que très peu de texte et, surtout, aucun commentaire. Re-explication de Laurence Lasserre:

« Il n’est pas possible, matériellement, de répondre aux messages. Nous n’en avons pas les moyens logistiques et techniques. »

Pas les moyens? Pourtant, lorsque l’on réunit les équipes travaillant pour le site du ministère et pour le blog vidéo, ce n’est pas moins de quatorze personnes que l’on dénombre. Presque autant qu’à Rue89 (qui reçoit mille commentaires par jour)!

Sur ces quatorze personnes, deux font en plus partie de l’entourage direct de la ministre: Laurence Lasserre et son assistant Thomas Fené. Et cet entourage direct compte trois personnes supplémentaires chargées de la communication: une attachée de presse, Amandine Martin, un stagiaire rémunéré sous convention, Arthur Dreyfus, sans oublier le porte-parole, Guillaume Didier.

Ministère, mairie, mélange des genres

A titre de comparaison, Michel Vauzelle (PS), garde des Sceaux d’avril 1992 à mars 1993, n’employait qu’une seule attachée de presse. Son successeur deux ans durant, Pierre Méhaignerie (UDF), comptait un conseiller en communication et une attachée de presse. Deux communicants, un chiffre stable sous les règnes suivants d’Elisabeth Guigou, Dominique Perben et Pascal Clément.

La liste des communicants de Rachida Dati ne s’arrête pas là. Son allongement révèle d’ailleurs la stratégie de communication de la ministre. Tout d’abord, le mélange des genres. Rachida Dati n’est pas que ministre, elle est aussi maire du VIIe arrondissement de Paris.

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Une conseillère de Rachida Dati répond à Rue89

Guillaume Didier assure n’avoir « aucun contact » avec l’attachée de presse de la mairie, Cathy Bounaix, qui elle-même nous affirme… « travailler évidemment en étroite collaboration avec Laurence Lasserre, Guillaume Didier et Amandine Martin ».

Les relations ministère-mairie sont donc loin d’être inexistantes, et Emmanuelle Dauvergne n’y est pas étrangère non plus. Conseillère technique au ministère de la Justice, elle a été élue en même temps que Rachida Dati dans le VIIe arrondissement en sa qualité de numéro trois sur la liste aux dernières élections municipales.

La désormais conseillère municipale a été chargée de « l’accueil et l’information du public et des projets numériques ». C’est elle qui est à l’origine de la refonte du site Internet de la mairie et elle est rédactrice en chef de « 7 à vous », le nouveau journal d’arrondissement.

Dix communicants de plus rattachés au cabinet

Pourtant la ministre va encore renforcer les capacités communicantes de son cabinet. Selon nos informations, la dizaine de personnes qui composent le bureau de presse du Scicom (Service central de l’information et la communication) vont très prochainement être rattachées au cabinet de Rachida Dati.

Ainsi, cet organe chargé d’effectuer la veille médiatique, de rédiger des dossiers de presse et d’écrire des communiqués de presse pour toutes les juridictions sous l’égide du ministère de la Justice ne va plus se concentrer que sur la communication de la seule ministre.

Une communication centrée sur sa personne, directement inspirée de la méthode Sarkozy. « Rachida Dati a été conseillère puis porte-parole de Nicolas Sarkozy pendant la campagne présidentielle. Il a été son chef d’équipe, il l’est toujours. Un gouvernement, c’est aussi une équipe », décrypte Guillaume Didier.

Mais son porte-parole précise aussitôt: « Il y a une très forte pression médiatique sur Rachida Dati, mais elle s’est toujours attachée à replacer cet intérêt sur son action. » Raison pour laquelle, certainement, elle a accepté en décembre dernier de faire la couverture de Paris-Match pour une longue série de photos dans un grand hôtel parisien… Des photos glamour qui ont fait sursauter un ancien ministre de la Justice, pourtant du même bord politique:

« Les photos de Match, c’est une faute de communication. De mon temps, mon cabinet aurait dit ‘c’est une mauvaise idée’. Quand on est garde des Sceaux, on est symbolique. En robe de soirée, on voit trop la femme et pas assez la fonction, c’est too much! Pour faire court, elle est plus connue que ses actions, elle n’a pas peur de son moi. »

Difficile d’aborder « le fond des réformes »

Même agacement du côté de Carole Mauduit, membre de l’Union syndicale de la magistrature, pour qui sa « surmédiatisation » est « désarçonnante » et a empêché d’aborder « le fond des réformes ». (Ecouter le son)


« Pourquoi refuser de faire la couverture d’un magazine populaire? C’est très rare de proposer ça à un ministre de la Justice. On l’a fait une fois et on nous l’a reproché pendant six mois », s’agace Laurence Lasserre. C’est vrai qu’elle n’a que très rarement eu l’honneur de la une de grandes revues. Oubliée la photo en couverture de Point de Vue au bras du couturier de Dior John Galliano, moins de trois mois plus tôt?

Une amnésie qui semble être contagieuse chez les communicants de Rachida Dati. Ou alors Romain Mouton, son chargé des relations presse durant la campagne des municipales, n’a pas peur des contradictions:

« Rachida Dati a eu une volonté très claire de ne pas médiatiser sa campagne. » Elle a pourtant accordé dès le mois de novembre une grande interview au Parisien pour confirmer sa candidature.

« 99% des réunions publiques se sont déroulées sans caméra. » Pourtant, au seul meeting où Rue89 était présent, on pouvait à peine filmer tellement il y avait de caméras…

« Les réunions publiques n’étaient pas annoncées à la presse. » Lesdites réunions étaient pourtant systématiquement mentionnées à l’avance sur le groupe Facebook « Rachida Dati pour Paris ».

« Tout est calculé selon une question: ‘Qu’est-ce que ça va rendre en terme d’image?’ », se désole un ancien responsable de la communication sous trois précédents gardes des Sceaux. « Un ministère régalien exige de la retenue. Mais les gens ne sont pas cons, tout ça commence à lasser. »

Une cote qui dégringole de 59% à 33% en un an

La cote de Rachida Dati est en effet en chute libre. Selon le baromètre TNS Sofres pour Le Figaro Magazine, alors que 59% des personnes interrogées en juillet 2007 souhaitaient « lui voir jouer un rôle important au cours des mois et des années à venir », elles ne sont plus que 33% en juillet 2008. (Voir l’infographie)

« Maintenant qu’elle s’est installée dans le paysage, il y a moins de curiosité sur sa personne », conclut Laurence Lasserre. « On va essayer d’être plus audible sur le fond. » Ce n’était pas censé être déjà le cas?

Julien Martin et David Servenay

Retrouvez moi : http://monmulhouse.canalblog.com/





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