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Mon Mulhouse3
25 juin 2008

L'Etat confie la réalisation de ses investissements au privé

Trois grands groupes apparaissent comme les principaux bénéficiaires du partenariat public-privé

L'Etat confie la réalisation de ses investissements au privé

Les contrats de partenariat public privé (PPP) refont parler d'eux. Sur fond de mobilisation des architectes et des artisans qui craignent de perdre des marchés, les députés entament, mercredi 25 juin, la seconde lecture du projet de loi qui vise à élargir leur utilisation.

Créés par l'ordonnance du 17 juin 2004, sous l'impulsion du libéral Alain Madelin, les PPP permettent à une entité publique de confier à un seul opérateur privé le financement, la conception, la construction d'un équipement, hôpital, prison, musée, école, ligne de chemin de fer, puis son exploitation et sa maintenance pendant quinze, vingt, voire quarante ans. L'attributaire d'un PPP est principalement rémunéré sous forme de loyers payés par la collectivité publique.

Jusqu'à présent, la formule était réservée aux projets complexes ou urgents. Du coup, seuls 25 contrats ont été conclus depuis l'ordonnance de 2004 pour un montant total d'investissements de 500 millions d'euros et une valeur globale, sur toute leur durée, de 1,3 milliard d'euros (3,3 milliards d'euros si l'on inclut les formules juridiques proches, baux emphytéotiques hospitaliers ou administratifs). Un contrat de PPP, lancé par le conseil général du Loiret pour le collège de Villemandeur, a même été annulé par le tribunal administratif d'Orléans, le 29 avril à l'initiative du Syndicat national du second oeuvre, qui contestait l'urgence et la complexité du projet.

Avec ce projet de loi, le champ des PPP va s'élargir à de multiples domaines : santé, éducation, universités, rénovation urbaine, transports concourant au développement durable (trains, voies fluviales) rénovation des bâtiments dans un but d'économies d'énergie, à un moment où l'Etat connaît de graves difficultés budgétaires. Les engagements financiers à long terme pris dans ce cadre n'étant pas, pour l'instant, considérés comme une dette publique par la Commission européenne, les PPP sont un moyen de se doter de nouveaux équipements sans creuser en apparence le déficit budgétaire. L'artifice comptable n'est cependant pas du goût de la Cour des comptes, qui a dénoncé, dans son rapport 2007, "la myopie budgétaire des PPP". Le Conseil national de la comptabilité publique n'a pas tranché le débat.

MARCHÉ DE 6 À 10 MILLIARDS D'EUROS

Le gouvernement souhaite que 10 % à 15 % des 60 milliards d'euros que représente l'investissement public chaque année soient réalisés dans le cadre des PPP, comme le Royaume-Uni le fait avec les Private Finance Initiatives (PFI). Cela ouvre un marché de 6 à 10 milliards d'euros. Pour qui ? Essentiellement les majors du bâtiment et des travaux publics, seuls capables de s'engager sur de tels montants et durées. "Les petites et moyennes entreprises sont, de facto, évincées au mépris de la concurrence, car nous n'avons pas les moyens d'être, en plus, les banquiers des collectivités locales", s'insurge Jacques Petey. Le président de la Fédération nationale des coopératives du bâtiment (FNSCOP BTP) cite l'exemple de l'éclairage public. Seize PPP ont été conclus dans ce domaine entre 2005 et 2008, pour des montants de 2 à 100 millions d'euros, soit 280 millions d'euros au total. Les appels d'offres ont été remportés par Dalkia, filiale de Veolia (6 contrats), ETDE, du groupe Bouygues (4 contrats), Vinci (4 contrats), Spie (1 contrat) et Cegelec (1 contrat).

Quant aux marchés importants, ils se répartissent tout bonnement entre les trois majors. Vinci a remporté le contrat de rénovation de l'Institut national des sports (63 millions d'euros et 9 millions de loyer annuel, pendant trente ans) à Vincennes (Val-de-Marne). Eiffage a obtenu la construction du stade de la communauté urbaine de Lille (700 millions d'euros) et Bouygues s'est taillé la part du lion (1,8 milliard d'euros) dans l'édification et l'exploitation d'établissements pénitentiaires en projet : il en construira six sur dix, tandis qu'Eiffage aura la charge des quatre autres.

Le dernier contrat remporté en mars 2008 par Bouygues est celui qui va le plus loin dans les missions confiées à l'opérateur privé. Outre le financement de la construction, il devra, pendant les 27 ans de la concession, assurer la maintenance et le nettoyage des locaux mais aussi les services aux personnes, blanchisserie, restauration, soins et transport des détenus, ainsi que l'accueil des familles et même la gestion du travail des prisonniers et leur formation professionnelle, moyennant un loyer annuel de 48 millions d'euros.

S'agissant des mégaprojets en cours d'appels d'offres, comme la ligne ferrée à grande vitesse Sud Europe Atlantique (8 milliards d'euros) ou le canal Seine-Nord (4 milliards d'euros), partiellement financés par des fonds européens, la mission d'appui aux partenariats public-privé est allée présenter ses dossiers à Londres et Madrid. Elle voulait convaincre de grands groupes étrangers, espagnols notamment, de soumissionner. Mais aucun n'a osé défier les majors françaises.

Isabelle Rey-Lefebvre

Article paru dans l'édition du 26.06.08.

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